Cela fait un peu plus de quatre
ans, une nouvelle section syndicale est née
au CDE :
Pourquoi un nouveau syndicat,
nous direz-vous ? Et pour quoi faire ?
Si Sud a participé à des luttes
revendicatives, certains combats mis en avant
en ont interrogés plus d’un: l’avant-projet
de loi sur la prévention de la delinquance,
l’intégration des mineurs étrangers,
les Droits de l’Enfant, l’égalité
homme-femme, etc… doivent-ils faire partie
des attributions d’un syndicat dont la
mission première serait de se préoccuper
des intérêts des salariés
du Centre Départemental de l’Enfance?
Il s’agit là d’une
question de fond, et le sens de la particularité
de Sud Santé-Sociaux, (et des autres
syndicats du département réuni
au sein de Solidaires, anciennement appelé
groupe des 10). C’est précisément
parce que nous sommes au plus haut point préoccupés
par les intérêts des salariés
que nous ne voulons pas les dissocier de ceux
de l’ensemble de la Société.
Car là serait le piège.
Pour Sud, le syndicalisme doit
mêler étroitement la défense
des intérêts immédiats,
matériels et moraux, des salariés
et la transformation sociale en progressant
vers une société plus solidaire,
plus égalitaire et plus démocratique.
Il s’agit en effet de dépasser
un syndicalisme de « «prestations
de services », tendant vers le corporatisme,
pour proposer un syndicalisme où les
salariés soient acteurs, participent
aux débats qui les concernent en tant
que citoyens et se mobilisent pour transformer
leur condition de travailleurs et le monde qui
l’environne. C’est pourquoi nous
n’avons pas la prétention de «
faire concurrence » avec les autres syndicats
du CDE, mais au contraire de coopérer
avec eux si cela peut permettre de faire progresser
les intérêts des salariés.
Aujourd’hui, le syndicalisme
est en crise : trop souvent intégré
comme partenaire social dans une gestion sans
perspective du modèle ultra-libéral
(libéral au sens de liberté de
plus en plus grande accordée aux intérêts
des entreprises et des actionnaires au détriment
des salariés), il se refuse souvent les
moyens d’être, comme à ses
origines, un véritable contre-pouvoir.
Fort de la division du mouvement syndical et
ouvrier, le libéralisme a multiplié
de ce fait les individualismes. Le capitalisme
libéral des années 1980-2000 entend
promouvoir l’individu pour mieux casser
les résistances collectives. Il ne veut
surtout pas de salariés conscients de
leurs conditions de dominés et prêts
à s’organiser collectivement pour
promouvoir un autre modèle de vie en
commun, sur leur lieu de travail et plus généralement
dans la société, pour un autre
partage des richesses, pour une autre fiscalité,
une autre protection sociale, des services publics
répondant aux besoins de la collectivité,
un droit du travail ambitieux, une réduction
du temps de travail …
Sud nourrit donc entre autre l’objectif
de contribuer à retisser les liens de
solidarité que les défenseurs
du capitalisme libéral essaient de rompre
pour imposer d’importantes régressions
sociales à l’ensemble du monde
du travail.
Nous avons au pouvoir un gouvernement qui n’a
d’autre ambition politique que de casser
tous les acquis sociaux. Les ultra-libéraux,
de droite ou de gauche, iront de plus en plus
loin ,de plus en plus fort, tant que le mouvement
social ne se mobilisera pas davantage. Ils profitent
des failles du mouvement syndical. Ils ont à
leur disposition des outils millénaires
qui ont fait leurs preuves plus d’une
fois : le nationalisme, la xénophobie,
l’égoïsme, la concurrence
exacerbée entre les individus (que le
projet de Constitution européenne veut
pousser à son paroxysme).
Le S de SUD prend ici tout son sens : nous ne
nous relèverons pas de sitôt si
nous acceptons l’exclusion de pans entiers
de la Société. Les travailleurs
sociaux sont plus que d’autres confrontés
à ce choix, car ils sont confrontés
à des enjeux de solidarité sur
le terrain professionnel : on leur demande de
plus en plus de relayer les politiques dans
ces projets d’exclusion, qu’il s’agisse
des sans-papiers, des chômeurs, des précaires,
des familles…Mais ces politiques sont,
en fin de compte, dirigées vers les salariés
eux-mêmes
Conscients de cet enjeu, nous serons davantage
armés pour nous mobiliser contre la précarisation
de nos conditions de travail. Car si l’Union
fait la force, la Solidarité fait l’Union.
Au CDE, ce ne sont pas les chantiers qui manquent.
Comme dans le reste de la Société,
le service public est dans le collimateur .Les
activités rentables sont appelées,
insidieusement, à être livrées
sur un plateau au secteur « lucratif ».
La Loi 2002 est là pour en accélérer
la livraison en facilitant le « tri ».
Les activités non rentables, elles, risquent
de disparaître ou d’ être
« dévalorisées » .Au-delà
du recul des « droits sociaux »
pour les usagers au détriment d’enjeux
de « profits », c’est un statut,
une qualification, des décennies de richesses
d’expériences en travail social
accumulées qui sont appelés à
être remis en cause .
De moins en moins de titulaires ; de plus en
plus de contrats précaires : voilà
ce qui nous attend en hors d’oeuvre. Mais
au-delà des lois, il y’a les pratiques
qui accélèrent leur institution
et leur mise en œuvre : ne laissons pas
la précarité gagner du terrain
; ne laissons pas nos conditions de travail
se dégrader.